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L’Oyat, une Poaceae caractéristique de la dune littorale

 L’Oyat (Ammophila arenaria) est une plante dominante que l’on rencontre sur les dunes sableuses de nos littoraux.
La dune est un milieu de vie très particulier qui est extrême (sécheresse, salinité, substrat qui se déplace…).
Cet article s’intéresse donc à savoir quelles sont les différentes structures anatomiques et physiologiques permettant à l’Oyat de survivre à ce milieu extrême.

 

 Présentation de l’Oyat et de son milieu de vie :

 

Les dunes littorales sont des accumulations de sables stabilisées par la végétation.
Trois zones bien distinctes sont observables au niveau d’une dune littorale : le haut de plage, la dune blanche et la dune grise. L’Oyat (Ammophila arenaria) est caractéristique de la dune blanche (aussi nommée dune mobile). La dune blanche est une zone fortement soumise aux embruns (gouttelettes d’eau de mer projetées dans l’air), aux vents et à l’insolation (réverbération liée aux grains de sable).
De plus, elle présente un substrat sableux très mobile. Tous ces éléments font de cette dune, un milieu aux conditions de vie relativement difficiles. Quelles sont les stratégies qui permettent à l’Oyat de se développer dans ce milieu contraignant ?

 

Photo 1/5 : Ensemble d’oyats : c’est l’espèce dominante présente sur la dune blanche.

L’Oyat est une plante de la famille des Poaceae. Elle se présente sous la forme de touffes d’une hauteur variable (en moyenne 80 cm). L’Oyat présente une tige rigide et effilée, ses feuilles sont raides et allongées. L’Oyat présente de longs rhizomes (tige souterraines) très développés en profondeur et de manière horizontale.

Différentes stratégies permettant de limiter l’impact des contraintes du milieu de vie ont été sélectionnées chez l’Oyat.

La dune blanche est fortement soumise aux vents, ces derniers provoquent un déplacement du substrat.
Ce déplacement pourrait induire un déchaussement du plant et sa mort. L’Oyat possède un ensemble racinaire très ancré en profondeur, en plus de posséder des rhizomes développés. Associé à ces éléments, l’Oyat présente autour de ses racines une gaine mucilagineuse qui permet de stabiliser le substrat. Cet ensemble limite la mobilité du substrat et fixe la plante de manière forte à la dune.

 

Photo 2/5 : Un plant d’oyat sur la dune blanche

La sécheresse est une contrainte majeure au niveau de la dune blanche. Cette sécheresse est en partie liée au substrat sableux qui est drainant. D’autre part, cette sécheresse est induite par la non-disponibilité chimique de l’eau : l’eau de mer contient des ions Na+ et Cl qui rendent l’eau non disponible pour la plante (pression osmotique non adaptée pour des échanges d’eau entre le milieu de vie et la racine). Deux stratégies sont donc possibles pour la plante : limiter ses pertes et optimiser son absorption d’eau.

Le plant d’Oyat présente un ensemble racinaire pivotant très profond qui, en plus de permettre l’ancrage dans le substrat, permet une augmentation de la surface de collecte d’eau.

 

 

Photo 3/5 : Le sable des dunes est un ensemble de petites particules entre 2mm à 0,2mm de diamètre. La granulométrie du sable provoque une faible rétention d’eau. De ce fait, dès qu’il y a une période sans pluie, le sable ne contient plus d’eau et la dune devient un milieu sec.

 

Anatomie d’une coupe transversale d’Oyat et limitation
des pertes en eau :

Au sein d’une plante, des échanges gazeux ont lieu lors de la réalisation de la photosynthèse, ces échanges se font au niveau de structures spécialisées : les stomates. Les pertes d’eau peuvent donc se faire au niveau de ces stomates. L’Oyat possède différentes structures et mécanismes qui lui permettent de protéger ses stomates et donc de limiter les pertes d’eau : voir photos de coupe d’oyat et croquis ci-dessous.

Photo 4/5 : coupe transversale d’oyat  observée au microscope optique (grossissement X 40) .
Cette coupe est colorée au carmino vert d’iode. Ce type de coloration colore en rose les tissus contenant de la cellulose et en vert les tissus contenant de la subérine ou de la lignine.

Croquis d’observation de la coupe d’oyat.
Le code couleur de la coloration a été respectée : en rose, les parois cellulaires contenant de la cellulose et en vert, les parois cellulaires contenant de la subérine et/ou de la lignine.

L’Oyat présente sur la partie inférieure de ses feuilles une cuticule (composées de cires lipidiques) épaisse et imperméable qui empêche les pertes d’eau. Au niveau de la feuille on retrouve un tissu épais et lignifié : le sclérenchyme qui est également imperméable. Sur la partie supérieure de la feuille, de très nombreux poils recouvrent l’épiderme. Ces derniers permettent de réfléchir la lumière, limitant ainsi l’échauffement qui induirait une évapotranspiration. Ces poils permettent également de limiter la vitesse du vent, réduisant ainsi l’assèchement.

Photo 5/5 : Coupe transversale d’oyat  observée au microscope optique (grossissement X 100) .
Cette coupe n’a pas était colorée. La couleur verte est donc ici naturelle, il s’agit du mésophylle qui est
le tissu chlorophyllien où a lieu la photosynthèse.

Changements physiologiques des feuilles d’oyats
sans ou avec un déficit hydrique :

Les feuilles d’Oyat ont la capacité de s’enrouler ou de se dérouler suivant les conditions hydriques : lorsqu’il y a un déficit hydrique (manque d’eau) la feuille s’enroule ce qui limite les pertes. À l’inverse, lorsqu’il n’y a pas de déficit hydrique, la feuille est déroulée. Ce mécanisme d’ouverture et de fermeture est possible grâce à la présence de cellules particulières au fond des cryptes : les cellules bulliformes. En cas de turgescence des cellules bulliformes (vacuole pleine d’eau), la feuille est déroulée. Lorsqu’il y a un manque d’eau, les cellules bulliformes sont en plasmolyse (vacuole vide), la feuille est enroulée. L’enroulement permet de protéger les stomates d’éléments qui peuvent augmenter les pertes d’eau : le vent (assèchement) et l’insolation (augmentation de la température provoquant l’évaportranspiration).

L’ensemble de ces structures et processus permettent de limiter les pertes d’eau et d’augmenter l’absorption racinaire.

Schéma coupe d’oyat sans déficit hydrique

Schéma coupe d’oyat avec déficit hydrique

Publication : Avril 2020
Auteur(s) : Mathilde Maillefaud, professeure de SVT au lycée Claude Gellée, Epinal.
Crédits croquis-schémas : Mathilde Maillefaud
Crédits photos : Pierre-Jean Riou et Mathilde Maillefaud

 

Bibliographie :

Botanique, Biologie et physiologie végétales, Meyer, Reeb, Bosdeveix, Ed. Maloine
-La végétation dunaire et sa dynamique – Complément d’excursion en préparation Agrégation SVT – M.A Selosse, O. Manneville et D. Busti

-Poly d’écologie marine des facultés de Montpellier et Marseille dirigé notamment par Thomas Silberfeld, Sylvain Coq, Jean-François Mauffrey
-Le site Doris : L’oyat