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Faune des lavandes

La faune des lavandes

La lavande est une plante cultivée dans le sud de la France. Lorsque les champs sont fleurit de juin à juillet, on peut y observer une biodiversité impressionnante d’arthropodes dont une majorité d’insectes.
Alors qu’une étude publiée en 2017  montre que la masse d’insectes volants a diminué de plus de 75 % en moins de trente ans dans les réserves naturelles de l’ouest de l’Allemagne, il devient crucial de favoriser le maintient de cette biodiversité pour le futur de l’agriculture, étant donné le rôle des insectes pollinisateurs.(voir Pour la Science de Septembre 2019).

Les cultures de champs de lavandes couplés à d’autres cultures pourraient favoriser le maintient de nombreux insectes pollinisateurs. En tout cas une certitude : vous ne reviendrez pas indemne de découvertes et observations d’une balade de seulement 10 minutes dans un champ de lavandes ! Entre le parfum agréable, les belles couleurs et les différentes stratégies de mimétismes ou de prédations. Bonnes découvertes !

Un champ de lavandes dans la vallée de la Drôme, dans la région du Diois.

Les butineurs

Ce sont les arthropodes les plus nombreux présents dans les lavandes. Toutes les fleurs attirent les pollinisateurs qui viennent chercher nectar et pollen à profusion ! On observe de loin les grands papillons colorés et lorsqu’on s’approche on entend le vrombissements des abeilles et bourdons. Avec un regard plus attentif on peut voir que certaines abeilles sont en réalité des mouches !

Lépidoptères (papillons)

Ce sont les premiers insectes visibles dans les lavandes du fait de la grande taille de certaines espèces ainsi que leurs couleurs vives : jaune, blanc, rouge,bleu… On papillonne à les observer !

Le papillon Flambé : Iphiclides podalirius. Un des plus grands et beaux papillons que l’on peut trouver dans les champs de lavandes. On le trouve dans toute la France métropolitaine. Attention de ne pas le confondre avec l’Alexanor. Le Flambé a sur ses ailes des motifs zébrés caractéristiques.

L’Alexanor : Papilio Alexanor qui ressemble au papillon Flambé. L’Alexanor se trouve en France seulement dans le sud-est.

Le Silène : Brintesia Circe. C’est un grand papillon de couleur sombre avec des lignes blanches. Il apprécie les milieux herbeux et secs.

Le tabac d’Espagne (Argynnis paphia)

Le papillon moro-sphinx, ce reconnaît facilement à ces ailes que l’on ne peut pas voir lorsque le papillons vole puisque que celles ci battent trop vite. Ce papillon ressemble à un petit colibri.

Un papillon de la famille des zygènes. Il s’agit ici du zygène des garrigues : zygena erythrus. Les zygènes présentes souvent des couleurs rouges vives. Cette coloration vive aposématique avertit les prédateurs de leur toxicité.

Le papillon soufré (Colias hyale). Il porte ce nom à cause de sa couleur jaune prononcée comme le soufre. Cependant attention de ne pas le confondre avec le papillon citron qui est également jaune, mais généralement plus fluo avec des nervures plus marquées et des points colorés plus petits sur ses ailes.

Si l’on est en présence d’un mâle, impossible de se tromper ! Il n’existe en France aucun autre papillon possédant cette belle couleur jaune vif. La femelle, possède quand à elle une couleur jaune pâle, plus discrète.
Les couleurs du mâle n’apparaissent vraiment que lorsqu’il est en vol… car lorsqu’il est posé (voir photo ci-dessus), le Citron se transforme aussitôt en feuille, repliant ses ailes les unes contre les autres.
C’est une espèce mimétique : les nervures en relief et les contours de ses ailes le font ressembler à une feuille et lui permettent de se fondre totalement, au repos, dans un décor végétal, c’est donc un cas de camouflage.

Le papillon citron (ganopteryx rhamni). C’est l’un des papillons ayant la plus grande longévité à l’état adulte (ou imaginal), car au contraire de nombreux papillons qui hiverne sous forme d’oeufs, de larves (chenilles) ou de nymphes (chrysalides), le citron hiverne à l’état adulte.

 

Hyménoptères (guêpes, abeilles, fourmis…)

Abeilles, bourdons et parfois guêpes : ce sont les insectes les plus nombreux dans les lavandes et les premiers que l’on entend ! C’est eux qui sont les pollinisateurs majoritaires.
Les abeilles domestiques sont souvent l’hyménoptère le plus commun surtout si il y a une ruche proche du champ de lavandes.
La ruche en bord de champ permet la fabrication d’un bon miel de lavandes !

Le butineur le plus fréquent dans de nombreux champs de lavandes : l’abeille domestique Apis mellifera.

Les bourdons sont plus trapus et plus velus que les abeilles sauvages ou domestiques. Plus velu et capable de produire sa chaleur corporelle, le bourdon vole à partir de 5 ºC alors que l’abeille sort à partir de 15 ºC.
Ici il s’agit d’un bourdon à thorax noir et abdomen rouge et noir, on parle familièrement de bourdon à « cul orange ».
Il s’agit du Bombus lapidarius surnommé le bourdon des pierres ou le bourdon cul-brun. C’est un bourdon commun dans toute l’Europe.

Le bourdon terrestre, Bombus terrestris, recrée tous les ans de nouvelles colonies établies sous la terre, est commun en Europe.
Il est essentiel en région tempérée où il est plus efficace que les abeilles car il pollinise dès l’aube, au printemps à des températures inférieures à 15 °C, par temps couvert, pluvieux et même venteux. Il présenterait une importance croissante en matière de pollinisation, en raison notamment du recul des populations d’abeilles sauvages et domestiques.

Une abeille solitaire du genre Anthidium. On la surnomme l’abeille cotonnière car elle récupère des poils de feuilles qu’elle met en boule et transporte pour ensuite construire son nid.

Deux comportements sont intéressants et facile à observer chez cette abeille :
-On la retrouve souvent immobile se tenant à l’aide de ses mandibules sur un plant de lavandes, c’est une station de repos, comme sur la photo ci dessus.
-Le mâle a un comportement territorial agressif contre les autres mâles ainsi que les autres insectes qui viennent butiner les fleurs de leur territoire, en les percutant à haute vitesse.

Diptères (mouches et moustiques…)

Les mouches sont plus discrètes et on les confonds souvent avec les abeilles et les bourdons : ce sont les syrphes; des mouches mimétiques.

La tachinaire corpulente, Tachina grossa, est la plus grosse mouche d’Europe, on peut  la confondre avec un bourdon à cause de sa taille.
Elle s’identifie facilement : elle est de couleur noire mis à part sa tête qui est jaune avec de nombreux poils sur son corps.
Elle est active de fin juin à début septembre, elle fréquente les fleurs pour leur nectar.
Sa larve est parasite de chenilles de papillons.

Une mouche de la famille des bombyles. Les bombyles sont également des mouches mimétiques : elles sont très poilues et semblent recouvertes de fourrure.

Photo de gauche : La milésie faux-frelon (Milesia crabroniformis) est une mouche mimétique du frelon européen. Elle est ici entrain de butiner des fleurs de lavandes. Le zoom sur la photo présente les balanciers ou altères (ailes atrophiées) qui sont agités rapidement pour maintenir la stabilité en vol.

Photo de droite : Frelon européen (Vespa crabro) entrain de se nourrir de fruit pourri dans un compost

Les prédateurs

L’abondance d’insectes pollinisateurs attire les convoitises : de nombreux arthropodes attendent ou chassent les butineurs pour se nourrir. Le camouflage est souvent utilisé pour prendre par surprise les butineurs en pleine activité.
Ainsi le champ de lavandes reste un endroit où il est assez facile de voir en direct une scène de prédation, instant assez rare à observer dans le reste de la nature.

Araignées

Les araignées sont les prédateurs les plus nombreux dans les lavandes. Deux grandes méthodes de captures sont possibles : soit par piégeage à l’aide d’une toile soit par attaque surprise en attrapant au vol un malheureux butineur passant par là.

Une araignée crabe (thomise) a capturé un bourdon de deux fois sa taille grâce à son venin qui le tue quasi-instantanément !
Parfois, la petite bête peut bien manger la grosse !

Une petite araignée vient de capturer une abeille domestique. Il s’agit de la thomise globuleuse ,Synema globosum, également appelée araignée Napoléon, car on observe sur son abdomen un motif noir qui rappelle la silhouette d’un buste de Napoléon Ier.

L‘Argiope frelon, Argiope bruennichi, porte le nom de frelon car elle a de belles couleurs jaune et noire zébrées tous comme le frelon. Elle capture ses proies à l’aide de sa toile, on la retrouve communément dans les prairies et bord de chemins.
Cette alternance des stries jaunes et noires agit comme un leurre visuel rendant l’araignée moins visible pour ses proies, bien qu’au milieu de sa toile.
L’argiope frelon présente un dimorphisme sexuel important : le mâle est deux fois plus petit que la femelle et il est beaucoup plus terne.

Mantoptères :

 La mante religieuse, mantis religiosa, porte ce nom car en attendant sa proie, elle semble prier avec ses pattes ravisseuses.
C’est l’espèce la plus commune de mantoptère.

Les antennes sont bipectinées (forme de peignes) chez le mâle et filiformes (forme de fils) chez la femelle. Il s’agit donc ici d’une femelle.
Les empuses se nourrissent de petites proies, surtout des mouches que l’on peut bien sûr trouvé aussi dans les lavandes.

L’Empuse commune, Empusa pennata, égalemment surnommé « le diablotin de Provence » est une mante religieuse facilement reconnaissable : elle est de couleur marron à vert et sa tête est surmontée d’un cône et son abdomen est souvent relevé.

Hémiptères :

Deux punaises réduves (rhinocoris eyrthropus) ou punaises « assasines » se nourrissent d’une abeille domestique capturée dans les lavandes. Elles chassent leurs proies en volant de fleurs en fleurs, puis grâce à leur rostre piqueur elles piquent et aspirent le liquide de leur proies.

Une autre espèce de réduve, de couleur rouge vif, il s’agit de rhynocoris iracundus – la réduve irascible. Comme son nom l’indique, ce réduve n’apprécie guère être dérangé. Cette espèce est la plus méridionale de France.

Les phytophages (mangeur de plantes)

Il s’agit du groupe d’insectes le moins fréquents, les phytophages se nourrissent soit des feuilles de la lavandes soit de ses fleurs. Ils ne sont jamais en grand nombre et représente un danger minime pour la production de fleurs.

La cétoine dorée, cetonia aurata, ou « hanneton des roses » est un insecte de la famille des coléoptères, elle de taille moyenne : 1,5 à 2cm. L’adulte se nourrit de fleurs, comme sur cette photo des fleurs de lavandes. La larve vit dans la terre et se nourrit de bois en décomposition.

La chrysomèle américaine : Chrysolina americana ou Chrysomèle du romarin, est une espèce de petit coléoptère (5 à 8mm), de la famille des chrysomélidés, aux élytres présentant de beaux reflets métallisés verts et violets.
Elle n’a d’américaine que le nom ! : L’espèce a été décrite par le naturaliste suédois Carl von Linné en 1758, qui pensait que l’espèce provenait d’Amérique, alors qu’elle est originaire du pourtour méditerranéen.
Elle se nourrit de lamiacées : lavande, thym, romarin…
Photo de gauche : chrysomèle américaine se nourrissant d’une feuille de lavande
Photo de droite : chrysomèle américaine sur un plan de romarin (la photo est prise de plus près)

Conclusion : 

L’actualité n’est malheureusement pas réjouissante du point de vue de la biodiversité en générale et des abeilles en particuliers.
Le déclin des abeilles domestiques est un désastre planétaire et d’autres familles d’insectes sont encore plus menacés comme les bourdons.
Alors afin d’aider tous ces butineurs et aussi leurs prédateurs petits (araignées, punaises, mante religieuse…) et grands (oiseaux…) il faut refleurir notre vie ! Planter des fleurs d’espèces différentes qui ensemble ont une floraison la plus étalée tout au long de l’année afin de fournir de la nourriture le plus longtemps pour les butineurs. Pour vous aider dans cette entreprise, voici un lien intéressant : https://www.salamandre.org/article/ami-des-abeilles/

La salamandre est une revue naturaliste très intéressante pour tous les curieux de nature !

Ne pas utiliser d’insecticides, espacer et limiter le fauchage chez soi. Laisser des zones sauvages dans son jardin ou gazon. Construire un hôtel à insectes…
Tous ces petits gestes quotidiens aides à la survie de ces espèces qui sont indispensables pour la production de la majorité de notre nourriture